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EDF : situation financière et avenir (04 05 2016)

Question de sénateur et réponse ministérielle publiées le 1er avril 2016 sur le site du Sénat (cliquer ici pour accéder au site du Sénat)

http://www.senat.fr/questions/base/2016/qSEQ16040807G.html

 

Question d'actualité au gouvernement n° 0807G de M. Ronan Dantec (sénateur de Loire-Atlantique)

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique.

Monsieur le ministre, voilà maintenant des mois que grandit l'inquiétude au sujet de l'avenir d'EDF. Lourdement, très lourdement endettée, à hauteur de 37 milliards d'euros, ce qui représente plus de 600 euros par Français, cette entreprise a vu fondre sa capitalisation boursière de 150 milliards d'euros en sept ans ! C'est l'indice clair d'une perte de confiance assez générale dans son modèle économique, survenant dans un contexte de forte baisse du prix de l'électricité sur les marchés européens.

Monsieur le ministre, il faut sauver le service public de l'électricité, eu égard aux enjeux en matière d'aménagement du territoire et de prix unique de l'électricité. Or, pour cela, il faut en finir avec les investissements aventureux.

Dans un monde où les investissements dans les énergies renouvelables sont désormais majoritaires – 286 milliards d'euros investis cette année –, entraîner une entreprise surendettée dans la réalisation d'une centrale nucléaire en Angleterre – le projet de Hinkley Point, qui coûtera 23 milliards d'euros – serait pure folie. Aucun banquier sérieux ne couvrirait une telle opération !

D'ailleurs, que la CGT d'EDF, fine connaisseuse de la maison et assez peu réputée pour son activisme antinucléaire, dénonce par avance le risque mortel de cet aventurisme devrait nous alerter davantage encore.

 
Monsieur le ministre, souscrivez-vous à l'analyse selon laquelle il est maintenant urgent d'établir une programmation pluriannuelle de l'énergie, ou PPE, crédible et cohérente avec la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte, qui fixe l'objectif d'une réduction à 50 % de la part du nucléaire dans le mix électrique d'ici à 2025, et prévoyant explicitement la fermeture d'une vingtaine de réacteurs nucléaires, pour reprendre le chiffre de la Cour des comptes ?

 
Seule l'adoption d'une telle PPE autoriserait EDF à intégrer dans son bilan, conformément à la proposition de M. Lévy, la prolongation de la durée d'amortissement de ses autres réacteurs, ce qui améliorerait son résultat et, par contrecoup, sa note financière, lui permettant de continuer à emprunter à des taux raisonnables.

Je ne doute pas, monsieur le ministre, que vous partagez cette analyse et que vous vous emploierez à la faire prévaloir, afin que puisse être sauvegardé un service public auquel nous sommes tous très attachés !

 

Réponse du Ministère de l'économie, de l'industrie et du numérique publiée dans le JO Sénat du 01/04/2016 p. 5028

 

Emmanuel Macron, ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique. Monsieur le sénateur, le problème d'EDF n'est pas le projet de Hinkley Point. Il peut se résumer très simplement : les décisions prises voilà dix ans, de manière du reste consensuelle, à quelques exceptions près, puis la loi NOME du 7 décembre 2010 portant nouvelle organisation du marché de l'électricité ont ouvert le marché de l'électricité à des prix de moins en moins régulés. Un chiffre suffit à illustrer cette réalité : alors que, en 2014, 20 % du chiffre d'affaires d'EDF était exposé à des prix non régulés, cette proportion dépasse 65 % cette année !

 

Dans le même temps, le prix de l'électricité a baissé de 40 %. De fait, le prix du mégawattheure, qui était de l'ordre de 50 euros au moment de l'ouverture du marché, est aujourd'hui d'environ 26 euros, tandis que la programmation de moyen terme d'EDF est fondée sur un prix de 37 euros et que le coût de production du mégawattheure d'électricité s'élève à 33 euros.

 

Cette situation tient au fait que le marché de l'électricité ne fonctionne pas de manière pleinement satisfaisante. En effet, il est aujourd'hui régi par le prix spot du charbon, du fait de la décision de plusieurs pays de reprendre la production d'électricité à partir de ce combustible, à l'encontre des décisions prises en commun et de tous les engagements environnementaux.

Dans ces conditions de marché, avec un tel niveau de prix, aucune filière de production d'électricité, qu'il s'agisse du nucléaire ou des énergies renouvelables, ne peut fonctionner de manière satisfaisante !

 

Dans ce contexte, vous avez tout à fait raison d'affirmer, monsieur le sénateur, que nous devons d'abord établir une programmation pluriannuelle de l'énergie conforme à la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte. Mme la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer soumettra au Premier ministre un projet dans les prochains jours.

Ensuite, des efforts partagés doivent être consentis par l'État et l'entreprise pour redresser la situation financière d'EDF. Par le passé, l'État actionnaire a prélevé trop de dividendes.

 

Dès cette année, nous avons décidé de transformer ces dividendes en actions. De son côté, l'entreprise doit procéder à des cessions et appliquer une plus grande modération salariale.

 

Par ailleurs, une régulation du prix du charbon est nécessaire, afin que puissent être réalisés les investissements indispensables dans le domaine des énergies renouvelables, conformément aux priorités que nous avons fixées à EDF, ainsi que les investissements liés à l'entretien du parc nucléaire, crucial sur le plan de la sûreté.

Enfin, renoncer au projet de Hinkley Point, ce serait renoncer au nucléaire !

Ronan Dantec. Je remercie sincèrement M. le ministre d'avoir indiqué que la programmation pluriannuelle de l'énergie respecterait la loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte ; c'est une information importante.

Je soutiens sa position en ce qui concerne la fixation d'un prix du carbone propre à réduire la part du charbon dans la production d'électricité en Europe. Cela montre que nous sommes d'accord sur de nombreux points ! Je maintiens, en revanche, que nous devons dire à EDF combien de réacteurs peuvent voir leur durée de vie prolongée, pour que l'entreprise puisse intégrer cette donnée dans ses comptes.

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